Le bandeau sur les yeux j’avance à petit pas. Voilà plus de trente minutes que nous marchons de la sorte, lançant un pas après l’autre dans l’obscurité espérant trouver le sol sous nos pieds. C’est épuisant. La lumière du Soleil brûle ma peau. La chaleur est insupportable et la chemise cintrée que j’ai eu l’idiotie de choisir ce matin pour aller à l’aéroport est sûrement maculée de larges auréoles de transpiration. « Avance ! » m’invective-t-on en me poussant dans le dos. Je manque de trébucher mais parviens à me rattraper in extremis. D’autres avant moi sont tombés, ceux-là je ne les entends plus. J’en conclus qu’il ne vaut mieux pas tomber. « Où est-elle ? Où est ma femme ? » demande nerveusement quelqu’un derrière moi. C’est la voix d’un vieil homme. Une voix éraillée chevrotante. Le pauvre homme, on lui a enlevé sa moitié, il semble perdu. « Elle est avec les autres femmes. Elles vont dans un autre camp. T’inquiètes pas papy, on va bien s’occuper d’elle. » répond l’homme qui m’a sûrement poussé à l’instant. J’entends un bruit sourd et un corps qui chute au sol. Le vieil homme se met à geindre, à sangloter sûrement. Je ne peux rien faire. Je dois continuer d’avancer ou bien c’est moi qui finirai par terre. Notre bourreau part dans un grand éclat de rire. Ce rire me glace le sang. C’est un rire clair. Une voix aérienne, jeune, très jeune. Je lui donne à peine 18 ans. Qu’est-ce qui peut mener un enfant à commettre ce genre d’atrocités de son plein gré. Le désespoir ? Le chômage ? La pauvreté ? Le manque d’éducation ? Pas le temps de réfléchir, je dois continuer d’avancer. Un pas après l’autre. Les minutes passent et le vieil homme continue de sangloter, pendant un temps indéterminé. Longtemps. Et puis notre jeune bourreau reprend la parole : « C’est bon, vous êtes arrivés. Vous pouvez enlever vos bandeaux. ». Nous nous exécutons comme un seul homme. La lumière éclatante me brûle les yeux. Après quelques secondes de mise au point, je discerne enfin correctement le paysage. Des palmiers, une grande piscine à débordement, eau limpide, bleue turquoise. Nous sommes à l’entrée d’un grand bâtiment design aux larges bais vitrés. Un hôtel. Je ne comprends pas. Où sommes-nous ? Pourquoi nous avoir enlevé ? Que faisons-nous ici ? La même stupeur semble frapper mes camarades d’infortune. Un assemblage hétéroclite de personnes âgées, de piliers de bars ventripotents aux joues rouges, de familles… Nous échangeons des regards inquiets sans trop comprendre ce qui nous arrive. Soudain, en hauteur en travers de la façade de l’entrée de l’hôtel, je remarque une banderole rouge écrites en larges caractères blancs. Ce que je lis n’a aucun sens. Pourtant, plusieurs voix enjouées répètent les mêmes mots que je viens de lire. «BIENVENUE AU CLUB LOOM !!» lancent en cœur plusieurs jeunes personnes qui se dégagent de la foule. Des jeunes hommes et femmes de 18-20 ans, beaux et bronzés, même short rouge et T-shirt blanc, une arme en bandoulière. Ils se rassemblent face à nous tous devant les portes de l’hôtel et répètent à nouveau, sourire d’un blanc éclatant aux lèvres, armes pointés dans notre direction : « BIENVENUE AU CLUB LOOM !! BIENVENUE EN VACANCES ! ».
Si la suite vous intéresse: suffit de demander.
Si la suite vous intéresse: suffit de demander.
5 commentaires:
Et ben fais péter la suite, du coup.
Attention, 2 fois "limpide" dans le même texte, c'est beaucoup, pour un mot pas si commun
C'est bien vrai. Je n'avais pas fait attention. Je corrige ça dès que je rentre. Merci bien.
La suite, et au trot. Au lieu de glander activement !
(Pas de cédille à "ici".)
Dis donc, ça avait l'air cool tes vacances.
Enregistrer un commentaire